Quelles armes juridiques pour les personnes LGBT victimes de discrimination au travail ?

Quelles armes juridiques pour les personnes LGBT victimes de discrimination au travail ?
En dépit des recommandations du Défenseur des droits pour prévenir les discriminations liées à l’orientation sexuelle et à l’identité de genre au travail (guide de 2017, « Agir contre les discriminations liées à l’orientation sexuelle et à l’identité de genre »), les statistiques montrent que les préjugés et l’exclusion des personnes LGBT restent bien ancrées dans monde du travail.

En effet, 46% des salariés estiment que "révéler son homosexualité à son entourage professionnel contribue à mettre mal à l'aise des collègues de travail", 20% des personnes LGBT déclarent s'être senties discriminées dans la recherche d'un emploi et 39% déclarent avoir fait l'objet de commentaires, ou d'attitudes négatives au travail. Une étude de l’INSEE de 2014 met également en évidence un écart de salaires, selon l’orientation sexuelle des hommes homosexuels notamment. Ces derniers ont en effet un écart de rémunération de 6,5% à la baisse par rapport à leurs collègues hétérosexuels.

Pourtant, les salariés LGBT sont censés être protégés juridiquement contre les discriminations, puisque les articles 14 de la Convention européenne des droits de l’Homme et 225-1 du Code pénal interdisent toutes formes de discriminations. En matière de travail plus particulièrement, le Code du travail pose un principe de non-discrimination (article L.1132-1 du Code du travail). Il interdit aux employeurs de discriminer les personnes sur le fondement de leur orientation sexuelle ou de leur identité de genre au cours de la procédure de recrutement, de l’accès à un stage ou d’une période de formation. L’employeur ne peut pas non plus de recourir à l’un de ces motifs discriminatoires pour sanctionner, licencier ou imposer de quelconques mesures discriminatoires directes ou indirectes aux salariés.

Dans ce présent article, il s’agira dans un premier temps de comprendre comment le droit caractérise les discriminations liées à l’orientation sexuelle ou à l’identité de genre (I), avant d’exposer les actions en justice qu’un salarié peut entreprendre s’il est confronté à une telle situation (II).  
 

I – Comment le droit caractérise une discrimination en raison de l’orientation sexuelle et de l’identité de genre ?


Le Cabinet ZENOU, contre les discriminations, vous explique ce que sont les discriminations en raison de l’orientation sexuelle (A) et de l’identité de genre (B) au travail.
 
  1. Les discriminations fondées sur l’orientation sexuelle au travail
 
L’orientation sexuelle d’une personne peut faire objet de discriminations sur le lieu de travail. La loi n’en donne pas d’exemples précis, mais la jurisprudence en livre un certain nombre. Nous pouvons citer l’affaire d’un salarié qui s’est vu freiner dans le déroulement de sa carrière, et qui avait été confronté à l’ambiance homophobe de son lieu de travail parce qu’il était homosexuel. La Cour de cassation avait estimé qu’il s’agissait bien d’une discrimination sur le fondement de l’orientation sexuelle du salarié (Cass. Soc., 24 avril 2013, n° 11-15.204). Il en va de même pour une entreprise, qui avait conclu des dispositions conventionnelles excluant un salarié ayant conclu un PACS avec son conjoint de même genre. Après la légalisation du mariage pour les couples de même genre, le salarié dans l’affaire avait souhaité se marier avec son conjoint, mais l’entreprise lui avait refusé les jours de congés spéciaux et une prime salariale, accordés aux salariés hétérosexuels à l’occasion de leur mariage (Cass. Soc., 9 juillet 2014).

Dans la même lancée, la Cour d'appel de Paris avait condamné, en 2018, l’employeuse d’un salon de coiffure qui avait employé le terme de « pd » pour licencier un coiffeur homosexuel. Cet arrêt venait réformer le jugement du Conseil de prud'hommes, qui avait considéré que l'insulte utilisée pour se référer à l’homosexualité du salarié, ne constituait pas une discrimination étant donné que les salons de coiffures employaient fréquemment des homosexuels... Par ailleurs, si les références à l’homosexualité d’une personne sont récurrentes de façon à l’exclure, de sa sociabilité avec ses collègues et/ou à l’affecter dans l’exécution de son travail, une situation d’harcèlement morale peut être caractérisée.
 
  1. Les discriminations fondées sur l’identité de genre au travail
A titre de rappel, l’identité de genre est sentiment d’appartenir à un genre. Cette notion est souvent reliée à la transidentité qui est le fait pour une personne de ne pas s’identifier au genre qui lui a été assigné à la naissance.Ainsi, la transphobie correspond à l’oppression que subissent les personnes transgenres, pouvant se manifester par des violences verbales, physiques et des discriminations. En droit, la loi du 6 août 2012 relative au harcèlement sexuel a consacré à l’article 225-1 du Code pénal, le critère de l’identité sexuelle comme étant un critère spécifique de discrimination, qui a ensuite été introduite dans le Code du travail à l’article L.1132-1. Les personnes trans se trouvent fortement confronté à la transphobie de l’accès au marché du travail à la rupture du contrat de travail.

L’enquête de l’Agence pour les droits fondamentaux de l’Union européenne publiée en 2014 montre que 44% des personnes transgenres ont déclaré avoir été discriminées dans la recherche d’un emploi et 35% au travail au cours des 12 derniers mois. Par exemple, une rupture de promesse d’embauche intervenue après que l’employeur ai découvert la transidentité de sa future salariée à la vue du sexe mentionné sur les documents officiels qu’elle avait présenté pour officialiser son embauche, comporte un caractère discriminatoire. Dans cette affaire, les juges prud’homaux de Tours avaient condamné l’employeur à 1 500€ d’amende (Conseil de prud’hommes de Tours, 4 juin 2015, n° 14/00448). Lorsque les actes transphobes sont répétés, il s’agit d’un harcèlement moral. C’est le cas par exemple lorsque l’employeur fait référence continuellement au genre de naissance de la personne, tout en connaissance de cause, ou la mégenre constamment. Cette transphobie se manifeste également à la rupture du contrat de travail. La Cour de justice de l’Union européenne a eu l’occasion de retenir la discrimination d’un salarié transgenre qui s’était fait licencié après avoir annoncé sa transidentité à son employeur.
 
  • Quid de la discrimination sur le fondement de l’expression de genre (ou de l’apparence physique) ?
La question de la discrimination se pose également à l’égard de l’expression de genre (ou de l’apparence physique) des salariés, c’est-à-dire la manière dont les personnes expriment leur genre à travers leurs habits, accessoires, etc., qui n’est pas toujours conforme aux normes établis par la société (exemple : les hommes portent des pantalons et pas de robes). Dans une affaire jugée en 2012, un serveur portant une boucle d’oreille avait été licencié parce que son employeur considérait, que ses boucles d’oreilles n’étaient pas compatibles avec sa qualité d’homme et qu’il portait ainsi atteinte à la renommée du restaurant. La Cour de cassation avait condamné l’employeur et estimait qu’un tel jugement de valeur était constitutive d’une discrimination (Cass. Soc., 11 janvier 2012).
 

II – Comment un salarié peut-il prouver une discrimination liée de son orientation sexuelle ou de son identité de genre ?


La condamnation d’une discrimination en raison de l’orientation sexuelle ou de l’identité de genre repose essentiellement sur l’apport de la preuve de son existence (A). Si la discrimination est reconnue par les juges prud’hommaux, l’employeur fautif peut être condamné et le salarié victime peut prétendre à des indemnités (B).
 
  1. Comment un salarié peut-il prouver l’existence de la discrimination subie en raison de son orientation sexuelle ou de son identité de genre ?
Un salarié qui s’estime victime d’une discrimination en raison de son orientation sexuelle ou de son identité de genre peut saisir le Conseil de prud’hommes et lui soumettre les éléments susceptibles de caractériser des mesures discriminatoires (Cass. Soc., 28 mars 2000, n° 97-45.258). Il incombe également à l’employeur de prouver que sa décision n’est pas discriminatoire et repose sur des éléments objectifs (article L1134-1 du Code du travail). Important : le salarié dispose de 5 ans à compter de la révélation de la discrimination pour demander la réparation de son préjudice.
 
  1. Quelles sanctions l’employeur peut-il recevoir et à quelles réparations le salarié peut-il prétendre ?
Les discriminations en raison de l’orientation sexuelle ou de l’identité de genre d’un salarié sont passibles de sanctions pénales pour l’employeur. Celui-ci risque 3 ans de prison et 45 000€ d’amende (article 225-2 du Code pénal). Si par ailleurs ces discriminations ont entraîné un harcèlement discriminatoire, 1 an d’emprisonnement et 3 750 d’amende peuvent être requis contre l’employeur (article L.1155-2 du Code du travail). Dans le cas où l’employeur a licencié un salarié et qu’il n’apporte pas la preuve que la mesure prise n’est pas discriminatoire, le licenciement est nul. Dans ce cas, le salarié peut être réintégré dans l’entreprise, à défaut, dans un emploi équivalent. Il n’a pas droit aux indemnités de rupture, puisque le contrat n’a pas été rompu, mais il devra percevoir une indemnité couvrant les salaires dont il a été privé.

Le salarié qui ne demande pas sa réintégration a le droit à une indemnité dont le montant équivaut à au moins six mois de salaire (art. L.1235-3-1), à une indemnité compensatrice du droit à préavis, à une indemnité de licenciement, ainsi qu’aux salaires dont il a été privé depuis la date de son licenciement nul jusqu’à la date à laquelle la réintégration est écartée. La Cour de cassation ajoute que si des mêmes faits correspondent à la fois à une discrimination et à un harcèlement moral, le salarié peut prétendre à une double indemnisation puisque les préjudices subis sont eux distincts (Cass. Soc., 3 mars 2015, n° 13-23.521).

Si vous êtes confronté à une mesure discriminatoire de la part de votre employeur ou à un harcèlement moral discriminatoire, Le Cabinet Zenou, avocat en droit du travail à Paris 20ème et protégeant les intérêts des salariés, Maître Zenou sensible aux discriminations en raison de l'orientation sexuelle saura vous défendre en cas de contentieux.

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