Transports en commun bondés, hausse du prix des tickets de métro, limitation de la circulation dans certains secteurs de la ville de Paris… Avec plus de 15 millions de visiteurs attendus pour les Jeux Olympiques et Paralympiques cet été, les habitants de la capitale sont de plus en plus inquiets quant à la possibilité de réaliser leurs déplacements quotidiens pendant les festivités. Selon une étude menée par le site de location Abritel, 71% des Parisiens indiquent, en effet, craindre des difficultés de déplacements à Paris et en région Parisienne.
Face à la perturbation de la circulation, pouvant entraîner retards et désorganisation du travail, certains employeurs peuvent être tentés d’en profiter, pour contraindre leurs salariés à prendre leurs jours de congés payés. Cela permettrait en plus à l’employeur de faire écouler les jours de congés payés de tous les salariés sur une même période, empêchant donc que ces derniers puissent les poser à un autre moment de l’année.
Maître Johan Zenou expert en droit du travail vous explique dans un premier temps, si un employeur peut contraindre ses salariés à prendre leurs jours de congés (I), dans un second temps sera déterminé à qui revient la charge de fixer la prise des congés payés (II), il sera également évoqué si l'employeur dispose de la faculté d'imposer les congés payés pendant la période des jeux olympiques (III), enfin le cas particulier de la fermeture annuelle de l'entreprise sera étudié.
Les congés payés, un droit au bénéfice des salariés
D’abord, il convient de rappeler que tous les salariés du secteur privé (ou d’un service public à caractère industriel et commercial comme la RATP, par exemple) ont le droit à un congé, payé à la charge de l’employeur, d’au moins deux jours et demi ouvrables par mois de travail effectif. La durée totale des congés payés ne peut, toutefois, excéder 30 jours ouvrables par an.
Les congés payés correspondent à une période d’arrêt de travail qui est, cependant, rémunérée par l’employeur. La mise à disposition de ces jours de congés constituent une obligation de l’employeur au titre de l’article L. 3141-3 du Code du travail.
En revanche, il incombe aux salariés d’exercer leur droit aux congés payés en demandant, de leur propre initiative, les jours de congés à leur employeur. Ainsi, si un salarié ne prend pas les jours de congés auxquels il a droit pendant la période de prise de congés déterminée, ces derniers seront définitivement perdus et le salarié ne pourra pas réclamer d’indemnité compensatrice à l’employeur. Aussi, les jours de congés payés ne peuvent être troqués contre une somme d’argent payée par l’employeur (sauf en cas de départ du salarié de l’entreprise et pour les contrats de travail à durée déterminée ou d’intérim).
En outre, depuis le 1er juin 2021 (Date d’entrée en vigueur de la loi n°2012-387 du 22 mars 2012 modifiant l’ancien article L.3141-3 du Code du travail qui exigeait une durée de travail effectif d’au moins 10 jours pour qu’un salarié puisse prendre ses jours de congés payés.) Les congés payés peuvent être pris par un salarié dès son embauche. L’accord nécessaire de l’employeur pour la validation des jours de congés payés. En vertu de son pouvoir de direction, l’un des pouvoirs de l’employeur qui lui reconnait la possibilité de donner des ordres et des directives aux salariés, l’employeur peut refuser ou accepter les demandes de prises de congés des salariés.
Lorsqu’un salarié souhaite prendre des congés payés, il est, en effet, tenu d’indiquer la date de début et de fin dudit congé à son employeur, qui doit donner son accord exprès, préalablement à la prise des congés.
Il est important de noter que l’accord de l’employeur doit être explicite. La Cour de cassation avait en effet estimé que, même lorsque l’employeur reste passif après un demande de prise de congés, cette passivité ne pouvait s’interprèté en une acceptation (Soc., 13 décembre 2023, n°22-17.890). Dès lors, le salarié qui prend ses congés au motif que l’employeur est resté passif face à sa demande peut se voir infliger une sanction disciplinaire, pouvant aller jusqu’au licenciement.
Le principe : L’accord collectif
Conformément aux dispositions du Code du travail, la période des prises de congés, l’ordre des départs pendant cette période et les délais que doit respecter l’employeur s’il entend modifier, l’ordre et les dates de départs sont déterminés par un accord d’entreprise ou d’établissement ou, à défaut, un accord ou une convention collective de branche.
Dès lors, les modalités de la prise des congés payés est négocié entre l’employeur et les différents syndicats représentatifs présents dans l’entreprise. Si l’entreprise ne compte aucun syndicat, il conviendra de vérifier si la convention collective dont laquelle les salariés relèvent comporte des dispositions relatives aux congés payés. Si c’est effectivement le cas, il conviendra de se reporter à ces règles pour savoir quelles sont les modalités de prise de congés payés propres à l’entreprise ou au secteur d’activité.
La période des prises de congés correspond au moment où les salariés peuvent prendre leurs congés pendant l’année. Elle est déterminée par accord d’entreprise ou par convention collective et comprend, dans tous les cas, la période du 1er mai au 31 octobre de chaque année.
La période du 1er mai au 31 octobre étant d’ordre public, ni les syndicats ni l’employeur ne peuvent y déroger. L’ordre des départs fait quant à lui référence à l’ordre de priorité dans lequel les salariés peuvent prendre leurs congés. Par exemple, il peut être décidé par accord collectif que les salariés ayant des enfants ou ceux ayant une ancienneté importante, dans l’entreprise bénéficient d’une priorité sur la prise de congés par rapport aux salariés non-parents ou nouveaux dans l’entreprise.
Enfin, si l’accord collectif prévoit que c’est l’employeur qui déterminera unilatéralement la période de prise de congés et l’ordre des départs, il pourra, en tous les cas, fixer les délais dans lesquels l’employeur devra informer les salariés de leur modification.
L’exception : Le pouvoir de l’employeur
Si aucun accord collectif n’a été conclu dans l’entreprise, et que la convention collective dont relève les salariés est muette sur les congés payés, le Code du travail prévoit qu’il revient à l’employeur de définir la période de prise des congés et l’ordre des départs (article L. 3141-16 du Code du travail).
Toutefois, l’employeur est tenu de consulter préalablement le comité social et économique (CSE) de l’entreprise et doit, de surcroît, tenir compte de l’ancienneté des salariés, de leur situation de famille ainsi que de leur activité chez un ou plusieurs employeurs pour déterminer l’ordre des départs.
Si l’entreprise ne comporte pas de CSE, ce qui est le cas dans les entreprises de moins de 11 salariés, ou dans celles où aucun salarié ne s’est présenté au premier et au second tour des élections professionnelles, l’employeur pourra alors déterminer, unilatéralement, la période de prise des congés et l’ordre des départs.
Par décret, les articles D.3141-5 et D.3141-6 du Code du travail précisent que l’employeur doit porter à la connaissance du salarié la période de prise des congés payés au moins deux mois avant l’ouverture de cette période. L'ordre des départs est par ailleurs, communiqué, par tout moyen, à chaque salarié un mois avant son départ.
Non pour plusieurs raisons.
D’abord, parce que, même dans le cas où il détermine unilatéralement la période de prise de congés, celle-ci doit a minima comprendre la période du 1er mai au 1er octobre. L’employeur ne pourra donc, en aucun cas, réduire la période de prises des congés du 26 juillet au 8 septembre, dates durant lesquelles les Jeux Olympiques et Paralympiques se dérouleront.
Aussi, la durée des congés pouvant être prise en une seule fois ne peut excéder 24 jours ouvrable, soit 4 semaines (article L. 3141-17 du Code du travail). En l’espèce, les Jeux Olympiques et Paralympiques s’étendront sur un peu plus de 6 semaines. Par conséquent, vous ne pourrez, en aucun cas, prendre des congés qui s’étendront sur l’ensemble de la durée des jeux puisqu’il n’est pas possible de déroger à la limite de 4 semaines fixée par le Code du travail.
En sus, il convient de rappeler qu’il est très rare que l’employeur puisse décider unilatéralement de la période de prises de congés et de l’ordre des départs puisqu’en pratique, les conventions collectives prévoient très souvent des dispositions relatives aux congés payées qui ont été négociées au niveau de la branche, du secteur d’activité dans son ensemble. L’employeur ne dispose, en effet, de ce pouvoir unilatéral que lorsqu’aucun accord collectif au niveau de l’entreprise ou de la branche a été conclu. Si c’est effectivement le cas, il incombe toutefois à l’employeur de consulter préalablement le CSE. Ce n'est ainsi que dans l’hypothèse où l’entreprise n’a pas de CSE que l’employeur pourra exercer son pouvoir unilatéral.
Enfin, il faut préciser que l’employeur décide de la période des prises de congés et de l’ordre de départ mais il ne peut pas imposer individuellement, à chaque salarié, de prendre ses jours de congés. La prises des congés reste à l’initiative exclusive des salariés.
Si l’employeur ne peut donc pas imposer aux salariés la prise de leurs congés, il peut néanmoins décider de la fermeture de l’entreprise pour la période des Jeux Olympiques. A ce titre, dans le cas de la fermeture exceptionnelle de l’entreprise, les salariés devront impérativement poser leurs jours de congés payés pendant le temps de la fermeture.
Ainsi, si le salarié n’a pas acquis assez de jours de congés payés pour couvrir toute la période de fermeture, il peut demander à l’employeur de bénéficier de ses congés par anticipation. En cas de refus par l’employeur, le salarié devra poser des journée de congés sans soldes.
Néanmoins, si le salarié bénéficiait des allocations-chômages avant son embauche (Allocation d'aide au retour à l'emploi ou Allocation de solidarité spécifique), il peut réaliser une demande d’indemnisation à l’agence France Travail dont il relevait lorsqu’il avait le statut de demandeur d’emploi.
Enfin, lorsque la fermeture de l’établissement dépasse la durée des congés légaux annuels (30 jours ouvrables conformément à l’article L.3141-3 du Code du travail), l’employeur, pourra lui aussi, être tenu de verser une indemnité à tous les salariés pour chacun des jours ouvrables de fermeture excédant cette durée.
Le télétravail, une alternative en faveur de tous
Face aux difficultés de déplacements, le télétravail se présente comme le compromis idéal pour les salariés, mais également pour les employeurs. Il permet aux salariés d’éviter les déplacements en période de forte affluence et pour l’employeur, d’assurer le bon fonctionnement du service en supprimant le risque de retards excessifs causés, par les problématiques liées au transport dans la capitale.
Le régime du télétravail est, en réalité, très peu règlementé par le Code du travail qui laisse le soin aux syndicats de négocier les modalités du télétravail avec l’employeur. Le Code du travail prévoit, que le télétravail est mis en place par un accord collectif ou à défaut par une carte établie par l’employeur après avis du comité social et économique de l’entreprise (article L.1222-9 du Code du travail).
Aussi, à défaut d’accord ou de charte, l’employeur peut convenir avec les salariés, individuellement, de la mise en place du télétravail. Il incombe simplement aux deux parties de formaliser, par tout moyen, leur accord sur le recours au télétravail.
Vous vous interrogez sur la légalité des congés payés imposés par votre employeur pendant les J.O ? Le Cabinet d'avocat Zenou vous conseille sur la détermination des congés payés durant cette période exceptionnelle.
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