La clause de dédit-formation définition mise en œuvre et conditions de validité

La clause de dédit-formation définition mise en œuvre et conditions de validité
Face à une compétitivité entre les entreprises de plus en plus forte, il devient nécessaire pour l’employeur de s’entourer de salariés compétents et qualifiés. Ainsi, différentes formations, dont le coût est parfois excessif, peuvent leurs être proposées. Il convient alors à l’employeur de sécuriser son investissement par l’introduction d’une clause de dédit-formation dans le contrat de travail.
 
Maître Johan Zenou, expert en droit social à Paris 20ème, vous explique toutes les subtilités à savoir sur la clause de dédit-formation en commençant par vous en donner une définition (I.), avant d’en aborder les conditions de validité (II.) et de mise en œuvre (III.) pour finir par les situations d’exclusion de la clause (IV.).

 

I. La définition de la clause de dédit-formation



La définition de la clause de dédit-formation appelle à s’interroger sur l’objet de la clause (A.) mais aussi à son intérêt (B.). 

 
  1. L’objet de la clause de dédit-formation
La clause de dédit-formation est un accord réciproque par lequel un employeur s’engage à assurer, le financement d’une formation pour le compte de son salarié, en contrepartie duquel ce dernier s’engage à rester à son service durant une certaine période donnée et, le cas échéant, à rembourser le coût de la formation sous la forme d’une indemnité de dédit, en cas de départ anticipé.

Bon à savoir : L’article L.6325-15 du Code du travail prévoit la nullité des clauses de dédit-formation lorsqu’elles sont insérées dans le cadre d’un contrat de professionnalisation. Hormis cette exception, elles peuvent valablement s’intégrer à tous types de contrats de travail (CDI, CDD, temps plein, temps partiel…). En outre, la Cour de cassation a jugé que seul le salarié est tenu par une clause de dédit-formation. Ainsi il ne peut pas s’en prévaloir comme une garantie d’emploi contre son employeur. (Cass. Soc., 5 janvier 1999, n°96-42.931).

 
  1. L’intérêt de la clause de dédit-formation 
L’intérêt de la clause de dédit-formation est double : elle profite autant à l’employeur qu’au salarié.
 
  • Coté employeur :
En raison de l’onérosité de certaine formation, cette clause permet à l’employeur de se prémunir contre d’éventuels départs à l’issue de la formation.  Elle a pour principal objectif de dissuader le salarié de démissionner de son emploi pendant une période déterminée. Ce laps de temps doit, en principe, permettre à l’employeur d’amortir le coût de la formation en tirant profit des nouvelles compétences et qualifications acquises par ce salarié. L’employeur peut aussi renforcer la portée de cette clause en l’associant à une clause de non-concurrence. De cette manière, il se protège non seulement contre le risque de démission, mais aussi contre la possibilité que le salarié démissionnaire puisse rejoindre la concurrence. 
 
  • Coté salarié :
Cette clause de dédit-formation a également un intérêt certain pour le salarié, puisqu’il a le droit à une formation qualifiante et onéreuse prise en charge en partie ou intégralement par son employeur. Sans cette dernière, il est fort probable que l’employeur aurait refusé de la lui accorder, par crainte de se faire évincer par la concurrence une fois la formation achevée.

 

II. Les conditions de validité de la clause de dédit-formation

 
Compte tenu des restrictions apportées à la liberté de démission et l’absence de dispositions légales, la validité de la clause de dédit-formation est soumis à un encadrement très strict instauré par la jurisprudence de la Cour de cassation. Ainsi, ce n’est qu’à la réunion de toutes ces conditions que le salarié se voit opposer ladite clause : une acceptation préalable par le salarié (A.) ; un certain nombre de mentions obligatoires (B.) ; des obligations de financement à la charge de l’employeur (C.) ; et enfin une préservation du droit de démission (D.). En l’absence ou en cas d’imprécision d’une des conditions, la clause de dédit-formation est frappée de nullité.    

 
  1. Une acceptation préalable par le salarié de la clause de dédit-formation
Pour qu’elle soit valable, la clause de dédit-formation doit être stipulée soit dans le contrat de travail en lui-même soit précisée par un avenant. Cette dernière doit ensuite être expressément acceptée par les deux parties avant le début effectif de la formation.

 
  1. Les mentions obligatoires de la clause de dédit-formation
Des mentions obligatoires doivent impérativement figurées au niveau de la clause de dédit-formation :
 
  • La date de la signature de la clause.
  • La nature et la durée de la formation.
  • Le coût réel de la formation prise en charge par l’employeur.
  • Le montant et les modalités de remboursement en cas de violation de la clause par le salarié.
 
  1.  Les obligations de financement à la charge de l’employeur
Repose sur les employeurs deux types d’obligations de financement :
 
  • Il faut que les frais de formation soient réellement et personnellement pris en charge par l’employeur. Ainsi la chambre sociale de la Cour de cassation a jugé illégale la clause de dédit-formation opposée au salarié qui avait suivi une formation financée par des crédits ministériels. (Cass. Soc. 19 nov. 1997, no 94-43.195)
  • Il faut que le coût de la formation proposée soit supérieure aux obligations légales et conventionnelles.  
 
  1. La préservation du droit de démission
La clause de dédit-formation a certes pour objectif de dissuader le salarié de rompre le contrat, mais ne peut en aucune manière le contraindre à poursuivre la relation de travail. Ainsi il est primordial que le salarié conserve la faculté de quitter volontairement son emploi (Cass. Soc., 17 juill. 1991, n° 88-40.201). Pour ce faire il faut que :
 
  • Le prix de la formation ne soit pas excessif au regard du but recherché par la formation.
  • La durée ne doit pas être manifestement trop longue. 
 

III. Les conditions d’applicabilité de la clause de dédit-formation    



Avant de s’intéresser aux effets de la mise en œuvre de la clause de dédit-formation (B.), il convient de préciser que celle-ci n’a vocation à s’appliquer qu’en présence d’une rupture du contrat de travail imputable au salarié (A.).
 
  1. Une rupture du contrat de travail imputable au salarié
La mise en œuvre de la clause de dédit-formation suppose que la rupture du contrat de travail soit imputable aux torts du salarié : démission, prise d’acte aux torts du salarié, départ volontaire à la retraite…    
 
Remarque : D’après une jurisprudence de la chambre sociale de la Cour de cassation, la clause de dédit-formation est même applicable au salarié qui décide de rompre son contrat de travail au cours de la période d’essai. (Cass. Soc., 5 juin 2002, n°00-44.327).

 
  1. Les effets de la mise en œuvre de la clause de dédit-formation
La violation par le salarié de la clause de dédit-formation entraine inévitablement le versement d’une indemnité de dédit à l’employeur. Celle-ci peut soit prendre la forme d’une indemnité forfaitaire soit celle d’une indemnité dégressive variant au prorata du temps passé dans l’entreprise. De plus, le remboursement doit se faire proportionnellement aux frais réellement engagés qui comprend le coût de la formation professionnelle, mais aussi les frais annexes liés à la formation (transport, hébergement, nourriture…). A l’opposé, les salaires perçus en parallèle de la formation ne peuvent pas être réclamé, par l’employeur en cas de rupture du contrat prématurée aux torts du salarié. (Cass. Soc., 5 octobre 2016, n°15-17.127,). Enfin, l’employeur n’est pas libre quant à la destination des sommes perçues au titre de l’indemnité de dédit, puisqu’il est dans l’obligation de les affecter intégralement au financement d’action de formation.
 

IV. L’exclusion de la clause de dédit-formation


Outre la nullité tenant à l’absence d’une des conditions de validité, l’application de la clause de dédit-formation est exclue non seulement lorsque l’employeur y renonce de son plein gré (A.) mais également lorsque la rupture est prononcée aux torts de l’employeur (B.) ou dans le cas d’un usage déloyale de celle-ci (C.).

 
  1. La renonciation à la clause de dédit-formation par l’employeur
L’employeur dispose de la faculté d’opposer ou non la clause de dédit-formation au salarié, ne respectant pas sa part d’engagement et ce même si elle a été valablement insérée dans le contrat de travail. Puisque la renonciation ne se présume pas, l’employeur soit de manière expresse, généralement par un écrit, exprimer au salarié sa volonté en des termes clairs et non équivoques pour que la clause de dédit-formation ne produise plus d’effets à son égard. Ainsi, sont exclus toutes renonciations verbales, toutes déductions implicites à partir du simple comportement de l’employeur ou encore toutes appositions laissant supposer à cette renonciation.

 
  1. La rupture du contrat de travail aux torts de l’employeur
Si le contrat de travail a été rompu aux torts de l’employeur, le salarié n’a pas besoin de rembourser l’employeur au titre de l’indemnité de dédit. Ce principe a été réaffirmé par la chambre sociale de la Cour de cassation : « une clause de dédit-formation ne peut être mise en œuvre lorsque la rupture du contrat de travail est imputable à l'employeur ». (Cass. 11 janvier 2012, n°10-15.481,).

 
  1. Le recours déloyal à la clause de dédit-formation
L’utilisation de la clause de dédit-formation doit se faire à des fins loyales. Elle doit être justifiée au regard de la formation proposée, mais aussi de la qualification du salarié. Ainsi, la chambre sociale de la Cour de cassation a jugé qu’un employeur ne pouvait pas utiliser, cette clause à des fins de stabilisation du travail dans un secteur en pénurie. (Cass. Soc., 4 juin 1987,).
 
Vous avez des questions concernant la mise en œuvre de votre clause de dédit-formation dans un contrat de travail ? N’hésitez pas à prendre contact avec le Cabinet Zenou, expert en droit du travail à Paris 20ème, qui répondra à toutes vos interrogations.

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