Commission médicale de recours amiable (CMRA) : comment contester une décision de la CPAM sur votre incapacité ou invalidité ?

Commission médicale de recours amiable (CMRA) : comment contester une décision de la CPAM sur votre incapacité ou invalidité ?

La commission médicale de recours amiable est l’organisme compétent pour traiter des contestations d’ordre médical et du contentieux technique de la Sécurité sociale. Depuis la loi du 18 novembre 2016 de modernisation de la justice du XXIe siècle, les réclamations contre les décisions médicales prises par les caisses de Sécurité sociale (Caisse primaire d’assurance maladie ou Mutualité sociale agricole) doivent, avant toute action en justice, faire l’objet d’un recours préalable devant la CMRA.  

L’introduction de ce recours préalable s’inscrit dans une logique de désengorgement des juridictions. Selon le rapport d’activité de 2019 de la CPAM de Paris, seules 120 décisions rendues (environ 8,3%) ont fait l’objet d’un recours judiciaire. Depuis 2019, la commission médicale de recours amiable connaît une activité croissante. En 2023, le nombre de recours devant la CMRA est de 8 787, soit une hausse de 15% de l’activité par rapport à l’année 2022.

Ces chiffres illustrent non seulement l’importance grandissante de la commission médicale de recours amiable, mais témoignent également de son efficacité à limiter le recours aux tribunaux, en proposant une résolution amiable des litiges.

   I) La composition de la commission médicale de recours amiable

La commission médicale de recours amiable est composée de deux médecins (article R142-8-1 du Code de la Sécurité sociale) : un médecin figurant sur la liste des médecins experts judiciaires spécialisés en matière de sécurité sociale devant les cours d’appel, et un médecin-conseil (praticien exerçant au sein des caisses d’assurance maladie et chargé de veiller au respect des règles médicales).


Le Code de la sécurité sociale dresse, à côté, une liste de médecins ne pouvant pas siéger à la commission, et ce, afin de garantir l’impartialité de la procédure. Sont ainsi visés : les médecins appartenant au conseil ou au conseil d’administration de la caisse concernée, le médecin qui a soigné la victime, le médecin attaché à l’employeur et le praticien-conseil de l’organisme auteur de l’avis médical contesté.

Par ailleurs, lorsque l’absence de médecin-conseil fait obstacle à la composition de la CMRA, le recours préalable peut être soumis au seul médecin expert.

 

   II) Les litiges concernés par le recours obligatoire

Depuis 2022, la commission médicale de recours amiable est compétente pour l’ensemble des contestations d’ordre médical, y compris pour le contentieux de l’expertise médicale (article R142-8 du Code de la Sécurité sociale).
Elle est notamment compétente pour les litiges relatifs à l’état ou au degré d’invalidité en cas d’accident ou de maladie non professionnelle, à l’état ou au degré d’inaptitude au travail ou encore à l’état ou au taux d’incapacité, en cas d’accident du travail ou de maladie professionnelle.
La commission médicale de recours amiable est compétente pour les recours formés par les assurés sociaux ainsi que par les employeurs.

La CMRA a aussi une compétence régionale. Elle examine les recours formés contre les décisions des organismes de sécurité sociale dont le siège est situé dans son ressort.

Ainsi, les réclamations contre les décisions des caisses de Sécurité sociale dans les domaines susmentionnés doivent obligatoirement être soumises à la commission médicale de recours amiable.

 

   III) Les modalités de saisine de la commission médicale de recours amiable

Le délai de saisine de la commission médicale de recours amiable est de 2 mois à compter de la notification de la décision contestée (article R142-1-A du Code de la Sécurité sociale). La jurisprudence prévoit qu’en l’absence de notification régulière des voies et délais de recours, le délai de 2 mois, pour contester la décision d’un organisme de sécurité sociale, ne court pas (Cass. Civ 2e. 27 juin 2024, n°22-17.881).

La CMRA peut être saisie par tout assuré, et le recours peut être effectué par tous moyens. En principe, aucun formalisme particulier n’est requis, néanmoins, il est recommandé de faire le recours par lettre recommandée avec accusé de réception, afin de pouvoir justifier de son existence.

La CMRA dispose quant à elle d’un délai de 4 mois à compter de l’introduction du recours pour se prononcer, étant précisé que l’absence de réponse dans ce délai vaut rejet implicite de la demande.

 

   IV) La décision de la commission médicale de recours amiable

La commission médicale de recours amiable va examiner le bien-fondé de la décision prise par l’organisme de sécurité sociale. Ce dernier lui transmet un avis médical et l’intégralité du rapport médical ayant permis de prendre la décision contestée (article R.142-8-2 du Code de la sécurité sociale).
Le rapport doit aussi être transmis, préalablement à l’introduction du recours, à l’assuré ou au médecin mandaté par l’employeur. L’assuré ou le médecin mandaté par l’employeur dispose alors d’un délai de 20 jours pour présenter des observations.
Néanmoins, la Cour de cassation considère que l’absence de transmission du rapport médical au médecin mandaté par l’employeur n’entraîne pas l’inopposabilité à l’égard de ce dernier de la décision de prise en charge (Cass. Civ 2e. 11 janvier 2024, n° 22-15.939). Le non-respect de cette formalité n’entraîne donc aucune sanction. L’employeur peut seulement se prévaloir de la décision expresse ou tacite de rejet de la CMRA et saisir le tribunal compétent aux fins d’inopposabilité de la décision.  

Une fois ce rapport en principe transmis, la commission établit à son tour un rapport qui comporte son analyse du dossier, ses constatations et ses conclusions motivées (article R142-8-5 du Code de la Sécurité sociale).

La CMRA peut à cette occasion procéder à un examen médical de la victime, qui peut se faire accompagner du médecin de son choix. La date de convocation doit toutefois lui être transmise au moins 15 jours avant l’examen.

La décision est prise à l’unanimité des deux médecins qui composent la commission médicale de recours amiable. Par exception, en cas de partage des voix, celle du médecin expert figurant sur la liste est prépondérante.

La CMRA rend alors un avis et le transmet à l’organisme de prise en charge, qui notifie sa décision à l’intéressé. Ainsi, à la différence des avis rendus par la commission de recours amiable (CRA), ceux pris en matière médicale par la commission médicale de recours amiable s’imposent aux organismes de sécurité sociale.

La décision conforme à l’avis de la CMRA doit être notifiée à l’intéressé par lettre recommandée avec accusé de réception et doit mentionner les voies et délais de recours. À défaut, le délai de 2 mois pour saisir le tribunal judiciaire ne commence pas à courir.


   V) Les modalités d’exercice du recours contentieux

Une fois la décision rendue par la commission, l’assuré peut toujours contester cette décision auprès du pôle social du tribunal judiciaire, qui a une compétence exclusive en la matière depuis le 1er janvier 2020.

L’assuré dispose alors d’un délai de 2 mois pour saisir le tribunal, à compter de la notification de la décision de la CMRA ou, en l’absence de réponse, à compter de l’expiration du délai de 4 mois. Le tribunal judiciaire compétent est celui du lieu du domicile du demandeur (article R142-10 du Code de la Sécurité sociale).

Après avoir valablement formé un recours devant la CMRA, l’assuré peut saisir le tribunal par requête remise ou adressée au greffe par lettre recommandée avec avis de réception (article R142-10-1 du Code de la Sécurité sociale).

Le requérant peut se faire assister ou représenter par son conjoint, son concubin, un représentant syndical ou encore un avocat (article L142-9 du Code de la Sécurité sociale).

Par ailleurs, ce n’est que lorsque le montant du litige est supérieur à 5 000 euros que le jugement rendu par le tribunal judiciaire est susceptible d’appel (article R211-3-25 du Code de l’organisation judiciaire). Néanmoins, il est toujours possible de saisir la Cour de cassation, que ce soit à la suite d’une décision du tribunal judiciaire en dernier ressort (montant inférieur à 5 000 euros) ou d’une décision de la cour d’appel.

En conclusion, la CMRA constitue une étape préalable obligatoire dans le cadre du règlement des litiges médicaux de sécurité sociale. Elle permet dans un certain nombre de cas de résoudre les litiges à l’amiable, évitant ainsi un contentieux long et complexe encadré par des délais strictes, et garantit le respect des droits de la défense comme du secret médical. En cas de doute, il est vivement recommandé de s'informer sur les modalités précises de constitution du dossier et de respecter les délais pour preserver ses droits.

Pour tout accompagnement dans vos démarches devant la CMRA ou le tribunal judiciaire, ou pour toute information supplémentaire, n’hésitez pas à contacter le Cabinet Zenou, avocat en droit de la sécurité sociale à Paris 20ème.

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