Les principaux délais de prescription en droit social

Les principaux délais de prescription en droit social
Le droit social connaît de nombreux mécanismes de prescriptions. Le salarié qui souhaite agir en justice, contester une décision de l'administration ou de son employeur doit redoubler de vigilance car, loin d'être harmonisés, les délais de prescription en la matière sont nombreux et assez courts. Chaque type d'action est enfermée dans un délai bien particulier.

Qu'est-ce-que la prescription ?

La prescription s'entend comme l'écoulement d'un délai à l'expiration duquel l'action judiciaire ne peut plus être exercée. En d'autres termes, le salarié qui ne saisit pas à temps le Conseil de Prud'hommes ne pourra plus exercer de recours pour faire valoir son droit. Son action en justice sera jugée irrecevable.
La prescription peut être suspendue ou interrompue.
La suspension de la prescription arrête temporairement le délai de prescription sans toutefois effacer le délai déjà couru.
A l'inverse, l'interruption de la prescription supprime le délai déjà acquis pour en faire courir un nouveau de la même durée.
 

Quels cas suspendent la prescription ?

La prescription est suspendue si le salarié est dans l'impossibilité d'agir par suite d'un empêchement résultant de la loi, de la convention ou de la force majeure (C. civ. art 2234) ou s'il a convenu de recourir à une conciliation ou médiation avec l'autre partie (C. civ. art 2238).
 

Quels cas interrompent la prescription ?

La saisine du Conseil de Prud'hommes, même incompétent, interrompt le délai de prescription (C. trav. R. 1452-1).
 

Le point de départ de la prescription

Il est important de savoir à quel moment démarre la prescription. Généralement on retient comme point de départ  « le jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaitre les faits lui permettant de l'exercer » (C. civ. art 2224).
 
A titre d'exemple, on retient le jour de la notification du licenciement au salarié comme point de départ de la prescription du licenciement.

Les délais de prescription les plus longs

5 ans en matière de discrimination :

Le Code du Travail prévoit que le salarié victime de discrimination a 5 ans pour exercer un recours à compter de la révélation de la discrimination (C. Trav L. 1134-5).
 
La simple connaissance des faits de discrimination par le salarié ne suffit pas à faire courir le délai. La « révélation de la discrimination » nécessite que le salarié dispose des éléments de comparaison mettant en évidence la discrimination.
 

5 ans en matière de harcèlement moral ou sexuel :

La prescription du harcèlement moral ou sexuel est fixée à 5 ans. Elle court à compter du dernier acte de l'auteur présumé du harcèlement ou du moment à partir duquel celui-ci n'est plus en mesure de renouveler ses actes à l'encontre de la victime.
 
La prescription est portée à 10 ans lorsque le harcèlement a causé un dommage corporel. Le délai court alors à la date de consolidation du dommage.
 
Le salarié peut obtenir la condamnation pénale de l'auteur du harcèlement. Dans ce cas, son action est soumise à une prescription de trois ans.
 

3 ans en matière de paiement du salaire ou des congés payés :

Le salarié qui n'a pas été payé peut exercer un recours devant le Conseil de Prud'hommes.
 
Son action se prescrit par trois à compter du jour où ce dernier a connu ou aurait dû connaitre les faits lui permettant de l'exercer.
 
De jurisprudence constante, la prescription court à compter de la date habituelle de paiement du salaire pour les salaires mensualisés et au terme de la période légale ou conventionnelle de prise de congés pour l'indemnité de congés payés.
 
Lorsque le rappel de salaire est effectué après la rupture du contrat de travail, le salarié dispose de trois ans à compter de ce jour pour agir.  L'action portera alors sur les sommes dues au titre des trois années précédant la rupture.
 

2 ans pour le litige intéressant l'exécution du contrat de travail

Le salarié a deux ans pour exercer une action portant sur l'exécution de son contrat de travail.
La prescription court à compter du jour où il prend connaissance des faits ou aurait dû prendre connaissance des faits. Ainsi le point est-il susceptible d'être reporté.
 
Par exemple, la prescription de l'action de requalification du CDD fondée sur l'absence de motifs de recours démarre au jour de la conclusion du contrat, les juges considérant que c'est au moment où le salarié conclut son contrat qu'il en apprécie le contenu.
 
Ce délai de deux ans s'applique, entre autres, aux actions portant sur :
  1. la validité d'une clause du contrat
  2. le respect des repos obligatoires, des durées maximales de travail
  3. la requalification du CDD
Attention, le report du point de départ ne peut avoir pour effet de porter le délai de prescription au delà de 20 ans.
 

2 ans pour faire reconnaître le caractère professionnel de son accident ou de sa maladie

En cas d'accident :
Le salarié victime d'un accident au temps et lieu de travail doit avertir son employeur sous 24 heures. L'employeur doit alors déclarer l'accident à la CPAM.
Le salarié dont l'employeur n'a pas déclaré l'accident dispose d'un délai de 2 ans à compter du jour de l'accident pour faire reconnaître son caractère professionnel.

En cas de maladie :
C'est au salarié d'effectuer les démarches nécessaires pour faire reconnaître sa maladie professionnelle auprès de la CPAM dans un délai de 15 jours après la constatation de la maladie ou la cessation du travail.
Dans tous les cas, il dispose d'un délai de deux ans, à compter du jour où il est informé par certificat médical du lien possible entre sa maladie et son activité professionnelle, pour faire reconnaitre le caractère professionnel de sa maladie. Au-delà sa demande sera rejetée.
 

2 ans pour engager la faute inexcusable de son employeur

Le salarié a deux ans, à compter de la reconnaissance officielle de sa maladie professionnelle ou de son accident du travail par la CPAM, pour engager la responsabilité civile de son employeur en cas de faute inexcusable de sa part.
Le recours s'exerce auprès du Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale ; le Conseil de Prud'hommes est incompétent.
Rappel : Pour engager la faute inexcusable, le salarié doit rapporter la preuve que l'employeur aurait dû avoir conscience du danger et qu'il n'a pas pris les mesures nécessaires pour en protéger ses salariés.

Les délais de prescription courts

12 mois pour contester la rupture de son contrat de travail

Le délai de prescription des actions portant sur la rupture du contrat de travail a été fortement réduit par l'ordonnance n°2017‐1387 du 22 septembre 2017. 
L'action portant sur la rupture du contrat de travail se prescrit désormais par douze mois, à compter de la notification de la rupture.
 
Par exemple, la jurisprudence retient comme point de départ de l'action portant sur la contestation du licenciement le jour de réception par le salarié de sa lettre de licenciement. Il convient alors d'agir vite car le délai commence à courir pendant le préavis de licenciement. 
 
En matière de licenciement économique, le point de départ de la prescription peut être reporté à la dernière réunion du CSE.
Ce nouveau délai de droit commun s'applique à toutes les ruptures :
  1. licenciement pour motif personnel ou économique
  2. rupture anticipée du CDD
  3. départ ou mise à la retraite
  4. démission
  5. rupture de période d'essai
  6.  prise d'acte
  7. etc.
Le salariéa 15 jours pour demander à l'employeur de préciser les motifs de la lettre de licenciement. A défaut, l'insuffisance de motivation caractérisée par le juge n'entrainera pas l'absence de cause réelle et sérieuse. Elle n'ouvrira droit qu'àune indemnitéqui ne pourra excéder 1 mois de salaire.


12 mois pour contester une rupture conventionnelle

Le salarié peut contester la validité, les conditions d'exécution ou l'indemnité de la rupture conventionnelle  homologuée par la DIRECCTE.
L'action doit être introduite dans les 12 mois suivants son homologation devant le Conseil de Prud'hommes. Passé ce délai, le recours du salarié sera jugé irrecevable.


6 mois pour contester le reçu solde tout compte signé, 2 ans à défaut

Le reçu pour solde tout compte est un document établi par l'employeur faisant l'inventaire de l'ensemble des sommes versées au salarié à l'occasion de la rupture de son contrat de travail.
 
Une fois signé le reçu, le salarié a six mois pour contester son montant et trois ans pour contester l'absence de sommes. Une fois le délai consommé, il revêt un caractère libératoire pour l'employeur.
 
L'employeur n'est pas en droit d'imposer la signature du reçu, c'est pourquoi il est recommandé de ne pas le signer. Le salarié disposera alors de deux ans pour contester son montant et trois ans pour contester l'absence de sommes.
 
Autre solution pour éviter que le reçu ne revête un caractère libératoire : émettre des réserves lors de la signature par l'ajout de formules telles que « sous toutes réserves de mes droits » ou « sous réserve de mes droits passés, présents et futurs.
 

2 mois pour sanctionner un fait fautif isolé

L'employeur qui souhaite sanctionner son salarié dispose d'un délai de deux mois à compter du jour où il a eu connaissance de la faute.
On retient comme jour d'engagement des poursuites disciplinaires le jour de remise de la convocation à l'entretien préalable ou le jour où la sanction est notifiée au salarié.
 
La mise en œuvre de poursuites pénales suspend le délai qui recommencera à courir à l'issue de l'instance pénale.
 
En cas d'agissements répétés, l'employeur peut prendre en considération plus lointain pour sanctionner le salarié qui aurait réitéré sa faute dans les deux mois.
 

3 ans en matière de prescription de la sanction

L'employeur ne peut pas prendre en compte une sanction antérieure de plus de trois ans pour sanctionner une nouvelle fois le salarié ou le licencier.  Le délai court à compter de la notification de la première sanction ; sa durée s'apprécie au jour de l'engagement des poursuites de la seconde sanction

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