Accident du travail définition et limites

Accident du travail définition et limites
En France, 604 565 accidents du travail ont été décomptés pour l’année 2021. L’année 2020 n’étant pas significative en raison de la pandémie de COVID-19 mettant à l’arrêt un nombre important d’activités, ce chiffre est comparé à celui de l’année 2019. Le rapport annuel des risques professionnels publié par l’Assurance Maladie en 2021 permet de noter une diminution de 8% du nombre d’accidents du travail (https://assurance-maladie.ameli.fr/qui-sommes-nous/publications-reference/assurance-maladie-risques-professionnels/rapports-annuels). De plus le nombre des accidents de travail mortels est également en recul puisqu’on en compte 645 en 2021. (soit 88 en moins qu’en 2019).
De la même manière, le nombre d’accident de trajet est également plus faible pour l’année 2021 (89 278) que pour l’année 2019.

Les accidents du travail se produisent de manière illégale en fonction du secteur d’activité. Le secteur des services est le plus touché (528 048 en 2019) suivi par le secteur de l’industrie (97 000 en 2019) et de la construction (82 293 en 2019). Ces chiffres sont indiqués par une étude de la Dares publié en octobre 2022 (https://dares.travail-emploi.gouv.fr).
 
La prévention de ces accidents ne cesse de croitre au sein du droit du travail, afin d’offrir une meilleure protection aux travailleurs et de limiter le nombre de ces incidents. En effet certaines mesures sont obligatoires telles que la mise en place d’un document unique d’évaluation des risques professionnels (DUERP). De plus l’employeur a l’obligation de respecter les principes généraux de prévention, tels que le remplacement de ce qui est dangereux par ce qui ne l’est pas ou la planification de la prévention, article L4121-2 du Code du travail. Il parait toutefois nécessaire de comprendre ce qu’est réellement un accident du travail et quelles sont les procédures l’encadrant.

 
I. Qu’est ce qu’un accident du travail ?
 
L’article L411-1 du Code de la sécurité sociale dispose qu’« Est considéré comme accident du travail, quelle qu'en soit la cause, l'accident survenu par le fait ou à l'occasion du travail à toute personne salariée ou travaillant, à quelque titre ou en quelque lieu que ce soit, pour un ou plusieurs employeurs ou chefs d'entreprise ». De ce fait trois éléments sont nécessaires afin de caractériser un accident du travail : un fait accidentel, une lésion et un lien entre l’accident et le travail. De plus, selon l’article L411-2 du Code de la sécurité sociale, les accidents de trajet entre le domicile et le lieu de travail sont également considérés comme des accidents de travail.
 
  1. Un fait accidentel 
 
La jurisprudence affirme que constitue un accident du travail « un évènement ou une série d’évènements survenus à des dates certaines par le fait ou à l’occasion du travail dont il est résulté une lésion corporelle », soc 2 avril 2003 n°00-21.768. Il peut en effet s’agir d’un évènement soudain ou d’une série d’évènements, le principal étant qu’ils puissent être datés avec certitude. C’est notamment ce qui différentie l’accident du travail de la maladie professionnelle pour laquelle il est impossible de fixer une date exacte. En effet le critère de la soudaineté, qui n’est pas totalement abandonné, peut permettre de distinguer l’accident de la maladie dont l’évolution est lente et progressive.

C’est ainsi qu’il a pu être jugé que des douleurs à la main ressenties par une salariée à la suite d’une exposition prolongée au froid, en raison d’une affectation à la découpe de viande dans un atelier réfrigéré, ne constitue pas un accident du travail, civ 18 octobre 2005 n°04-30.352.

 
  1. Une lésion
 
Pour caractériser un accident du travail, le fait accidentel doit nécessairement avoir occasionné une lésion. Cette dernière peut être corporelle ou psychologique. C’est ainsi qu’il a pu être jugé que constituait un accident du travail une dépression nerveuse consécutive, à de nombreux reproches formulés par l’employeur lors de l’entretien annuel d’évaluation du salarié, civ 1er juillet 2003 n°02-30.576. Cet entretien constitue le fait accidentel pouvant être daté exactitude.

La lésion peut apparaitre immédiatement après le fait accidentel ou quelque temps après l’incident. Une lésion peut être constitutive d’un accident du travail, quelle que soit sa date d’apparition par rapport à l’évènement dont elle résulte. De ce fait la cour de cassation a reconnu comme accident du travail, le paludisme contracté par un salarié en mission professionnelle en Afrique, bien que cette maladie ne se soit révélée que 10 jours après son retour, soc 17 janvier 1991 n°89-13/703.

 
  1. Un lien entre le travail et le fait accidentel
 
Deux situations sont à distinguer afin de qualifier ce lien entre le travail et le fait accidentel.
 
  1. Présomption d’imputabilité : accident survenu au temps et lieu de travail
 
L’accident qui survient pendant le temps et sur le lieu de travail est présumé être imputable au travail et sera donc qualifié d’accident du travail. L’importance sera donc de délimiter à quel moment et à quel lieu le salarié se trouve au travail. Pour se faire, l’élément pris en compte est la soumission par le salarié à l’autorité de son employeur. C’est ainsi qu’il a été jugé que :
 
  • Constitue un accident de travail le salarié tué pendant le temps et sur le lieu de travail par deux individus qui n’ont pas pu être identifiés, soc 15 juin 1995 n°93-20.688.
  • Constitue un accident de travail le salarié blessé, pendant le temps de travail, sur le chemin séparant les deux établissements de son employeur, civ 4 juillet 2007 n°06-17.005.
  • En revanche, ne constitue pas un accident de travail celui survenu lorsque le salarié revient sur son lieu de travail pour des raisons personnelles, civ 21 septembre 2007 n°16-17.580.

L'accident survenu en dehors des temps et lieux de travail peut bénéficier de la présomption d'imputabilité au travail, dès lors que le salarié se trouve sous l'autorité de l'employeur. Tel est le cas du salarié victime d'un malaise survenu dans la salle d'attente du médecin du travail, à l'occasion d'une visite médicale périodique, quand bien même celle-ci se déroulait en dehors des jours et horaires habituels de travail, civ 2, 6 juillet 2017, 16-20.119.
En revanche la présomption d’imputabilité peut être combattue lorsque l’employeur ou la caisse primaire d’assurance maladie rapporte la preuve que :
 
  • L’accident a une cause totalement étrangère au travail, soc 23 mai 2002 n°00-14.154 telle que l’évolution d’un état pathologique préexistant ayant évolué indépendamment au travail, civ 6 février 2004 n°02-31.182. Par exemple un accident vasculaire cérébral a une origine étrangère au travail, lorsqu’il est établi qu’il est directement lié à un état vasculaire pathologique favorisé par des facteurs individuels d’aggravation bien connus, civ 6 mai 2010 n°09-13.318.
  • Au moment de l’accident, le salarié n’était pas sous l’autorité de l’employeur. Il en va ainsi pour le salarié ayant quitté, pendant une durée prolongée, l'atelier dans lequel il travaillait pour effectuer des réparations sur son cyclomoteur, civ 2, du 3 avril 2003, 01-20.974.
 
Afin de bénéficier de cette présomption, le salarié doit apporter la preuve des circonstances exactes de l’accident, de la réalité de sa lésion et de sa survenance au temps et au lieu de travail. Cette preuve se fait par tous moyens tels que des témoignages ou un certificat médical, civ 10 décembre 2009 n°08-21.236.
 
Ainsi, la présomption d’imputabilité s’étend pendant toute la durée d’incapacité de travail, précédant soit la guérison complète soit la consolidation de l’état de la victime. De ce fait l’aggravation de l’état de la victime est couverte ainsi que les nouvelles lésions qui se manifestent, après l’accident dès lors que celles-ci surviennent avant la consolidation de l’état de la victime et se rattachant à l’accident du travail initial.
 
  1. Qualification d’un accident du travail en dehors de la présomption d’imputabilité
 
Dans le cas où la présomption d’imputabilité n’est pas en mesure de s’appliquer, le salarié peut tout de même parvenir à faire qualifier son accident d’accident du travail. La victime devra alors établir que l’accident a un lien avec le travail. Cette preuve a été établi :
 
  • A plusieurs reprises, dans le cas de suicide ou tentative de suicide survenus alors que le salarié se trouvait à son domicile, en arrêt maladie pour dépression, dès lors qu'il était établi que cet acte était survenu par le fait du travail, civ 22 février 2007, n°05-13.771.
  • Dans le cas d'un directeur d'agence bancaire, frappé et blessé, alors qu'il se trouvait à son domicile, par des malfaiteurs armés voulant s'emparer des clefs de la chambre forte de l'agence, dont il avait la garde ; l'agression dont ce directeur avait été l'objet était en rapport étroit avec la mission qui lui avait été confiée par son employeur d'assurer, pour des raisons de sécurité, la garde d'une partie des clefs de l'agence, soc 4 février 1987, n°85-13.532.
 
II. Quelle est la procédure de déclaration d’un accident du travail ?
 
Afin de bénéficier de la législation relative aux accidents du travail et des indemnités y afférentes, une procédure de déclaration doit être respectée.
 
  • En premier lieu, le salarié victime d’un accident lié à son travail doit informer ou faire informer l’employeur, par tout moyen, article L441-1 du Code de la sécurité sociale. Il dispose d’un délai de 24 heures pour se faire, sauf impossibilité absolue ou motifs légitimes, article R441-2 du Code de la sécurité sociale.
 
  • Ensuite l’article L441-2 du même code impose à l’employeur ou à l’un de ses préposés de « déclarer tout accident dont il a eu connaissance à la caisse primaire d’assurance maladie dont relève la victime » et ce quelle que soit la nature ou les conséquences de l’accident. Le chef d’entreprise a de ce fait l’obligation légale de déclarer les accidents de travail, et les accidents de trajet dont seraient victimes ses salariés même dans le cas où l’accident n’entrainerai aucun arrêt de travail. Il dispose d’un délai de 48 heures pour effectuer la déclaration, par tout moyen conférant date certaine à sa réception, article R441-3 du Code de la sécurité sociale. Ce délai ne commence de courir qu’à compter du jour où l’employeur a été informé de l’accident.

Dans le cas où l’employeur ne respecte pas cette obligation de déclaration, la victime peut elle-même déclarer cet accident auprès de la caisse primaire d’assurance maladie de son lieu de résidence. Le salarié dispose d’un délai de deux ans pour l’effectuer, article L441-2 du Code de la sécurité sociale. De plus en cas de rechute d’un accident du travail antérieur, c’est au salarié qu’il incombe d’en effectuer la déclaration en fournissant à la caisse tous les justificatifs médicaux nécessaires, article R443-4 du Code de la sécurité sociale.
 
  • Suite à la déclaration, la caisse devra instruire le dossier afin de décider si l’incident sera, ou non, pris en charge au titre de la législation relative aux accidents du travail.
 
 
Que risque l’employeur en cas de non-respect de la déclaration ?

 
Dans le cas où l’employeur ne respecte pas son obligation de déclaration de l’accident, il s’expose à des sanctions civiles et pénales :
 
  • Amende de 750 euros pour une personne physique ; 1 500 en cas de récidive, article R471-3 du Code de la sécurité sociale.
  • Pénalité financière en cas de fausse déclaration, d’absence de déclaration ou de non-remise à la victime de la feuille d’accident du travail, article L114-17-1 du Code de la sécurité sociale. En effet l’employeur doit délivrer à la victime une feuille d’accident nécessaire à l’indemnisation, article L442-5 du Code de la sécurité sociale.
  • Recouvrement par la CPAM auprès de l’employeur d’un indu correspondant à la totalité des dépenses engagées à l’occasion de l’accident, article L471-1 du Code de la sécurité sociale.
 
III. L’employeur peut-il émettre des réserves sur les circonstances de l’accident ?

 
Lors de la déclaration, l’employeur peut émettre des réserves par tout moyen conférant une date certaine à leur réception. s’il a des doutes sur les circonstances de l’accident, il dispose d’un délai de 10 jour franc à compter de la date à laquelle il a effectué sa déclaration pour en informer la caisse, article R441-6 du Code de la sécurité sociale. Dans le cas où l’employeur émet des réserves, la caisse primaire d’assurance maladie est contrainte d’effectuer une enquête afin de déterminer les circonstances exactes de l’accident. De plus selon l’article R441-8 du Code de la sécurité sociale cette enquête est obligatoire en cas de décès. Ces réserves doivent être motivées, civ 17 février 2011 n°10-15.276 et ne peuvent porter que sur les circonstances de temps et de lieu de l’accident ou l’existence d’une cause étrangère au travail, civ 1er décembre 2011 n°10-26.590. Par conséquent, ont été jugées comme ne constituant pas des réserves valables :
 

L’absence de réserves ne prive pas l’employeur de la possibilité, de contester par la suite le caractère professionnel de l’accident, civ 19 juin 2008 n°07-12.770. Le fait de ne pas émettre de réserves signifie que l’employeur admet implicitement que l’accident s’est produit au temps et au lieu de travail, civ 8 janvier 2009 n°07-15.390. Il lui est donc très difficile de revenir par la suite sur ces éléments matériels, civ 25 juin 2009 n°08-17.155.

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