Le contrôle d’identité : une procédure strictement encadrée

Le contrôle d’identité : une procédure strictement encadrée
Il ressort d’une enquête menée par le défenseur des droits en 2017 que  80% de ceux qui correspondent au profil de "jeune homme perçu comme noir ou arabe" ont été contrôlés ces cinq dernières années, contre 16% pour le reste des personnes interrogées. Par rapport à l’ensemble de la population, et toutes choses égales par ailleurs, ces profils ont ainsi une probabilité 20 fois plus élevée que les autres d’être contrôlés souligne le Défenseur des Droits.
 
A la suite de la parution de cette enquête, le Gouvernement a lancé une plateforme anti discrimination. Cette interface de signalement et d’accompagnement des victimes ou témoins de discriminations a été lancée le vendredi 12 février 2021 par Élisabeth Moreno, ministre déléguée auprès du Premier ministre chargée de l’Égalité entre les femmes et les hommes, de la Diversité et de l’Égalité des chances. La plateforme permettra, en lien avec les associations, d’apporter une réponse efficace, rapide et gratuite à ces injustices individuelles qui minent notre cohésion sociale. La gestion de cette plateforme a été confiée au Défenseur des droits
 
Les contrôles au faciès font partie de ce qu’on appelle en droit international le « profilage racial ou ethnique ». La Commission européenne contre le racisme et l'intolérance (ECRI) du Conseil de l'Europe définit ainsi le profilage racial comme une utilisation par la police, sans justification objective et raisonnable, de motifs tels que la race, la couleur, la langue, la religion, la nationalité ou l'origine nationale ou ethnique dans des activités de contrôle, de surveillance ou d'investigation.
 
Il n’en demeure pas moins, que toute personne se trouvant sur le territoire national doit accepter de se soumettre à un contrôle d’identité, comme en dispose l’article 78 du Code de procédure pénale. Cependant, le contrôle d’identité doit être effectué sous certaines conditions par les autorités de police. Maître Johan Zenou expert en droit pénal vous décrypte les conditions de mise en place du contrôle d’identité.
 
  • Le contrôle d’identité c’est quoi ?
 
Le contrôle d’identité est en France, une enquête effectuée par la police, afin d’établir votre identité. En réalité, le contrôle d’identité doit être effectué sans aucun signe distinctif poussant le policier à procéder au contrôle, sauf dans le cas où les forces de l’ordre disposent d’un signalement précis, les motivant à contrôler votre identité.
 
Bon à savoir : Le contrôle d’identité ne doit pas porter atteinte à votre dignité humaine. Il s’opère sur des critères prévus par la loi, ce qui exclut toute discrimination.

 
I. Qui peut contrôler mon identité ?
 
Le Code de procédure pénale encadre strictement le contrôle d’identité, par ailleurs, l’article 78-2 dresse la liste des personnes habilitées à opérer un contrôle d’identité. Les contrôles d’identités sont effectués exclusivement par les Officiers de Police Judiciaire (OPJ), par les Agents de Police Judiciaire (APJ) sous le contrôle des OPJ, et par les Agents de Police Judiciaire Adjoints (APJA).
 
 
À savoir : Le contrôle d’identité par la Police municipale est donc interdit. Vous pouvez donc refuser un contrôle d’identité si la personne devant vous n’est pas un OPJ, un APJ ou un APJA. Toutefois, si le contrôle d’identité est effectué par une des autorités citées précédemment, vous êtes dans l’obligation de vous soumettre à ce dernier.
 
  • Comment pouvez-vous justifier votre identité ?
 
La justification de votre identité peut se faire par plusieurs moyens, vous pouvez en effet montrer un passeport, une carte Nationale d’identité, un permis de conduire, un acte de naissance, un livret de famille. Par ailleurs, si vous êtes étranger et que vous séjourner en France vous pouvez présenter un titre de séjour un passeport, un permis de conduire, etc...

 
II. Dans quels cas puis-je faire l’objet d’un contrôle d’identité ?
 
Le contrôle d’identité peut être effectuer par les forces de l’ordre que sous certaines conditions :
 
  • En cas de suspicion d’infraction
 
Les autorités de police peuvent vous soumettre à un contrôle d’identité s’il existe une ou plusieurs raisons plausibles de vous soupçonner :
 
  • Que vous avez commis ou tenté de commettre une infraction ;
  • Que vous vous préparez à commettre un crime ou un délit ;
  • Que vous êtes susceptible de fournir des renseignements utiles à l’enquête en cas de crime ou de délit ;
  • Que vous avez violé des obligations ou interdictions auxquelles vous étiez soumises dans le cadre d’un contrôle judiciaire, d’une mesure d’assignation à résidence avec surveillance électronique, d’une peine ou d’une mesure suivie par le juge d’application des peines ;
  • Que  vous avez fait l’objet de recherches (exécution d’un mandat d’arrêt européen, exécution d’un arrêté d’expulsion).
 
Une dénonciation anonyme non corroborée par d'autres éléments d'information ni confortée par des vérifications, apportant des éléments précis et concordants ne constitue pas une raison plausible de soupçonner qu'une personne a commis ou tenté de commettre une infraction, permettant à des policiers de procéder à un contrôle d'identité. (Chambre Civ. 1re, 31 mai 2005 n° n° 04-50.033)
 
  • En cas de réquisitions du Procureur de la République
 
Les contrôles de police peuvent être ordonnés sur des réquisitions écrites du Procureur de la République qui veille à la prévention des infractions à la loi pénale comme en dispose l’article 39-1 et 78-2-2 du Code de procédure pénale telles que :
 
  • Les actes de terrorisme mentionnés aux articles 421-1 à 421-6 du Code pénal ;
  • Les infractions en matière d’armes mentionnées à l'article 222-54 du Code pénal et à l'article L.317-8 du Code de la sécurité intérieure ;
  • Les infractions en matière de vol mentionnées aux articles 311-3 à 311-11 du Code pénal ;
 
  • Les infraction de recel mentionnées aux articles 321-1 et 321-2 du Code pénal ;
  • Les infractions en matière d'explosifs mentionnés à l'article 322-11-1 du code pénal et à l'article L.2353-4 du Code de la défense.
 
Attention : si vous vous faites contrôler sur la voie publique, et qu’une infraction autre que celle visée dans les réquisitions du Procureur a été révélée, elle ne sera pas considérée comme nulle.
 
  • Pour la prévention d’une atteinte à l’ordre public
 
Vous pouvez, à tout moment, être soumis à un contrôle d’identité dans le cadre d’une prévention d’une atteinte à l’ordre public, quel que soit votre comportement, mais à condition que le principe de non-discrimination soit respecté. Ce type de contrôle est réalisé le plus souvent par la Police Administrative. Dans tous les cas, l’autorité en cause doit justifier des raisons pour lesquelles le contrôle d’identité est effectué comme en dispose l’alinéa 8 de l’article 78-2 du Code de Procédure pénale, l’identité de toute personne, quel que soit son comportement, peut également être contrôlée pour prévenir une atteinte à l’ordre public, notamment à la sécurité des personnes ou des biens.

Si vous êtes étrangers et que vous résidez en France, vous devez être en mesure de présenter les pièces et documents vous autorisant à séjourner en France. Les forces de l’ordre peuvent effectuer des contrôles de police pour vérifier votre identité. Ce type de contrôle est effectué par la Police Judiciaire, et n’est permis que lorsqu’il concerne des éléments objectifs extérieurs à la personne même de l’intéressé qui fait apparaître votre qualité d’étranger.
 
Exemple : La présence dans une voiture ayant une plaque d’immatriculation étrangère, et l’entrée ou sortie d’une ambassade ou d’un consulat étranger sont des éléments laissant apparaitre votre qualité d’étranger.
 
Néanmoins, l’apparence physique ou même la langue étrangère, ne sont pas des éléments objectifs pour que vous vous soumettiez à un contrôle d’identité. La chambre criminelle de la Cour de Cassation a pu juger que les mentions du procès-verbal, faisant état du contrôle d'une personne «de type nord-africain» étaient de nature à faire présumer que le contrôle d'identité avait été motivé par l'appartenance ethnique, réelle ou supposée, de la personne contrôlée, en méconnaissance de l'art.14 Conv. EDH, la Cour d'appel a justifié sa décision d'annulation. (Chambre criminelle du 3 novembre 2016 n°15-85.548)
 
  • Dans le cadre de la lutte contre le travail clandestin
 
Sur réquisition du Procureur de la république, les forces de l’ordre peuvent entrer dans les lieux, à usage professionnels, leurs annexes et dépendances, afin de s’assurer que les activités sont en règles et contrôler l’identité des personnes qui sont en train de travailler comme en dispose l’article 78-2-1 du Code de procédure pénale.
 
Rappel juridique : Seules les personnes occupées dans les lieux à usage professionnel peuvent faire l'objet d'un contrôle d'identité (Cour de cassation, 6 janvier 2010 n°08-15.513)

 
  • Dans le cadre des contrôles « SCHENGEN »
L’identité de toutes personnes peut être contrôlées près de zone proche de frontières, avion, train, voiture.
 
III. Qu’est-ce que vous risquez si vous ne vous soumettez pas à un contrôle d’identité ?
 
Dans l’hypothèse où vous refuseriez de vous soumettre au contrôle d’identité ou que vous êtes dans l’impossibilité de justifier de votre identité, vous serez alors dirigé au poste de police afin de procéder à une vérification d’identité comme en dispose l’article 78-3 du Code de procédure pénale depuis l’entrée en vigueur de sa nouvelle version le 26 janvier 2023. 
 
En effet, si vous refusez ou vous vous retrouvez ou dans l'impossibilité de justifier de votre identité, vous pouvez, en cas de nécessité, être retenu sur place ou dans le local de police où vous êtes conduit aux fins de vérification de votre  identité. Dans tous les cas, vous serez présenté immédiatement à un officier de police judiciaire qui vous mettra en mesure de fournir par tout moyen les éléments permettant d'établir votre identité et qui procèdera, s'il y a lieu, aux opérations de vérification nécessaires.
 
Vous avez le droit de prévenir à tout moment votre famille ou toute personne de votre choix. Par ailleurs si vous êtes un mineur de dix-sept ans, le procureur de la République doit être informé dès le début de votre rétention. Sauf impossibilité, le mineur doit être assisté de son représentant légal. La personne qui fait l'objet d'une vérification ne peut être retenue que pendant le temps strictement exigé par l'établissement de son identité. La rétention ne peut excéder quatre heures, ou huit heures à Mayotte, à compter du contrôle effectué en application de l'article 78-2 du Code de procédure pénale et le procureur de la République peut y mettre fin à tout moment.
 
En outre, si la personne interpellée maintient son refus de justifier de son identité ou fournit des éléments d'identité manifestement inexacts, les opérations de vérification peuvent donner lieu, après autorisation du procureur de la République ou du juge d'instruction, à la prise d'empreintes digitales ou de photographies lorsque celle-ci constitue l'unique moyen d'établir l'identité de l'intéressé.
 
A l’issue de la vérification, si votre identité a bien été établie, le Procès-Verbal, vos photos et vos empreintes seront détruites dans les 6 mois suivants cette vérification. A l’inverse, si votre identité n’a pas été établie, et que vous refusez de vous prêter à la prise d’empreinte digitale ou de photographie vous pourrez être placé en garde à vue, et la peine encourue pourra aller jusqu’à trois mois d'emprisonnement et de 3750 euros d'amende comme en dispose l’article 78-5 du Code de procédure pénale.
 
Vous pensez que votre contrôle d’identité ne s’est pas déroulé dans la parfaite légalité ? Le Cabinet Zenou expert en droit pénal situé dans le 20ème arrondissement de Paris saura vous représenter durant votre audition.

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